Le système semis direct au Maroc
Résultats de recherche concluants
Le Maroc est l’un des pays pionniers dans sa région qui a adressé la question de la conservation de l’eau est de l’efficience de son utilisation par les techniques de semis direct. Les résultats sur plusieurs années ont montré qu’il était possible de stabiliser le rendement par l’adoption du semis direct et le choix d’une rotation. En effet, la conservation de 80 à 100 mm d’une année de jachère à l’année de culture de céréale assure un apport d’appoint qui permet de dépasser des périodes de stress hydrique du milieu ou de fin du cycle. Cette technique très employé par les agriculteurs des plaines centrales de Abda, Chaouia et Zâaer, est connu sous le nom de «Taowe» c’est-à-dire un blé après une jachère labourée intensivement et maintenue sans mauvaises herbes. Ce système de culture ne permet en fait d’économiser que le tiers (30 mm) de celui obtenu par la jachère chimique et le semis direct. Le Tableau 1 montre qu’on peut stabiliser et améliorer la production de céréale tout en économisant dans les labours et les intrants.
La mesure de la productivité de l’eau, ou quantité de matière sèche produite par millimètre d’eau, montre qu’on peut produire 7,1 kg/mm/ha en semis direct contre 5,4 kg/mm/ha lorsqu’on laboure avec le pulvériseur à disques (cover crop).
Le semis direct a été aussi à l’origine d’une amélioration de la qualité physico-chimique du sol dans les parcelles ou ce système a été conduit suffisamment longtemps (Figure 1). Une augmentation de la matière organique ainsi qu’à la séquestration du carbone donc à la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Ces bienfaits sont aujourd’hui évalués, discutés et rémunérés dans les pays avancés par les industriels en guise d’un quota de carbone.
D’autres avantages suffisamment connus du semis direct tel le contrôle de l’érosion, la diminution des eaux de ruissellement et des inondations n’ont pas été étudiés au Maroc. Ils auraient pu élucider que la pratique de ce système pouvait éviter à certaines villes comme Settat, Mohammedia, les inondations boueuses il y a quelques années.
Performance du système chez les agriculteurs
Au Maroc et depuis 1997, le semis direct fait l’objet d’essais d’évaluation et de démonstration chez les agriculteurs. Actuellement, un programme est maintenu par le Centre Régional de la Recherche Agronomique de Settat au sein du laboratoire du machinisme. La superficie emblavée en 2009/2010 est d’environ 2000 ha. Une centaine d’agriculteurs sont déjà familiers avec le système. L’expérience réalisée avec l’ensemble de ces partenaires peut constituer l’ossature d’un programme de développement d’une plus grande envergure.
La figure 2 représente les résultats depuis 1997 chez un agriculteur dans la région de Settat. Le blé conduit en semis direct en rotation triennale blé/blé/jachère est comparé au blé conventionnel conduit par l’agriculteur. On remarque de grands écarts entre les deux systèmes de production et le plus remarquable avait été obtenu durant la compagne 1999/2000 où la commune a été entièrement sinistrée à l’exception de la parcelle de semis direct où la récolte a été de 10 qx/ha plus une cinquantaine de bottes de paille par hectare dont la valeur a atteint durant l’hivers suivante 45 dhs la botte.
Semis direct et économie d’énergie
L’agriculture, par son recours aux opérations de labour, constitue une source de dépense d’énergie non négligeable. Le semis direct permet une économie de près de 40 litres de gasoil par hectare. On peut évaluer les pertes des années de sécheresse où les agriculteurs n’ont pas de récolte et où le semis direct aurait pu leur économiser au moins les frais de labours. Le Maroc pourra réduire sa facture énergique annuelle des coûts de 40 000 tonnes de gasoil si on n’avait rien qu’un million d’hectare en semis direct. Les autres dépenses en lubrifiants, réparations et entretiens ainsi que ceux des investissements en équipement et amortissement du matériel sont autant de frais qui épuisent la faible trésorerie des agriculteurs au Maroc.
Semis direct et économie des semences
La semence constitue un autre poste de dépense où l’agriculteur qui adopte le semis direct peut réaliser des économies importantes qui lui permettront d’investir dans d’autres facteurs de production, en particuliers les engrais et les pesticides. En année relativement sèche de moins de 200 mm de pluies (2007/08), des doses de semis de 60, 80, 100, 120 et 140 kg/ha ont donné des rendements inversement proportionnelles aux doses avec 18 qx/ha obtenus pour 60 kg/ha contre 14 qx/ha pour les doses de 140 kg/ha. Evidemment, on ne peut réussir une bonne germination et un peuplement satisfaisant avec de telles faibles doses dans un mode de semis à la volée ou avec un semoir sur un lit de semis préparé aux pulvériseurs à disques (cover crop).
Les agriculteurs adoptent dans leur majorité 180 à 200 kg/ha de semence même sélectionnées, non par ignorance mais en connaissance de cause. Le semis direct offre la possibilité de réussir une levée qui dépasse les 90%.
Les résultats de la compagne 2008/09 confirment que, même en très bonne année, les doses de 120 kg et 160 kg ont donnée tous les deux des rendements semblables d’environ 45 qx/ha sur des sols calcimagnésique superficiel dénommées «Hrach». Dans des sols argileux profonds de type «Hamri» à Jemâa Riah, la dose de 120 kg/ha a frôlé un rendement en blé dur de 60 quintaux à l’hectare.
Si on fait le compte là aussi, l’économie est de taille sur un million d’hectares: 80 000 tonnes de semence, l’équivalent de ce qu’on produit comme semences certifiées aujourd’hui, pourra être économisé ou dit autrement on doublera la superficie actuellement recevant des semences sélectionnées.