Dosages réalisés en laboratoire
En laboratoire, le diagnostic de gestation des ovins est réalisé à partir de dosages hormonaux: sulfate d’oestrone, hormone lactogène palcentaire et dosage de la progestérone ou par des dosages de protéines spécifiques ou associées à la gestation.
Dosage de sulfate d’oestrone
L’origine des hormones oestrogènes dépend du stade de gestation. Au début, elles proviennent des ovaires. Elles sont ensuite produites par le placenta, surtout pendant les deux derniers tiers de la gestation.
Le sulfate d’oestrone est la principale hormone œstrogène présente dans la circulation maternelle durant la gestation. Elle est facilement dosable sur des prélèvements de lait ou de sang. Cependant, comme les concentrations de cette hormone dans le sang n’augmentent qu’à partir du 50ème jour de gestation (Figure 1, voir fichier PDF), il faut attendre le 70ème jour pour que le sulfate d’oestrone soit détectable.
Ainsi, ce diagnostic est qualifié de tardif. Un résultat négatif peut exprimer un état de non gestation mais n’exclut pas une gestation débutante. Par ailleurs, ce dosage permet de s’assurer de la viabilité fœtale durant les deux derniers tiers de la gestation. Le dosage ne permet pas de dénombrer les fœtus. En conséquence, cette méthode de diagnostic de gestation est peu utilisée.
Dosage de l’hormone lactogène placentaire
Cette hormone qui intervient dans le développement du fœtus et dans l’activité des glandes mammaires est déversée dans la circulation maternelle dès le 40ème-50ème jour de gestation. Elle est détectable dans le sérum de la brebis après le 48ème jour de gestation (Figure 2, voir fichier PDF). Cette apparition tardive dans le sang maternel prive ce dosage d’intérêt pour un diagnostic précoce de la gestation.
Dosage de la progestérone
La progestérone est une hormone indispensable dans le maintien de la gestation. Elle est produite par le corps jaune puis par le placenta (Figure 3, voir fichier PDF). Le dosage peut être réalisé sur des prélèvements de sang ou de lait, applicable dès le 17ème jour après la gestation (Figure 4, voir fichier PDF).
Ce test offre des valeurs d’exactitude de diagnostic de gestation d’environ 90% alors que les valeurs de diagnostic de non gestation approchent les 100%. Les limites du test résident dans l’obligation de connaître avec précision la date de saillie ou de l’insémination et d’en tenir compte individuellement, sinon il peut donner lieu à de faux diagnostics de gestation, ce qui est aussi possible en cas de mortalité embryonnaire précoce.
Pratiquement, ce dosage est très efficace pour le diagnostic de non gestation. Il permet aussi de remettre sans retard à la reproduction des femelles diagnostiquées non gestantes. L’autre avantage est son coût. Il est de l’ordre de 30 à 40 dirhams et peut être considéré comme raisonnable dans le cas de petits troupeaux.
Dosage des protéines spécifiques ou associées à la gestation
Décrites aujourd’hui sous diverses appellations indiquant leur caractérisation en tant que protéines spécifiques ou associées à la gestation (PSPB, PSP-60, PAG, SBU-3), elles ont été isolées pour la première fois chez les bovins. L’existence de protéines associées à la gestation et faisant partie du groupe des protéases aspartiques apparaît commune aux différentes espèces de ruminants mais n’est pas strictement limitée à ceux-ci. Des protéines similaires ont été identifiées également chez le cheval, le chat, et la souris.
Tout au début, deux protéines spécifiques de la gestation: les pregnancy-specific proteins A et B (PSPA et PSPB) ont été isolées à partir du placenta bovin. La PSPA, une protéine de masse moléculaire apparente de 65 à 70 kDa et présentant différents points isoélectriques (pI 4,0-4,4) s’est révélée ultérieurement identique à l’alphafœtoprotéine (AFP), une protéine synthétisée par le foie du fœtus et le sac vitellin de tous les mammifères. Elle présente une grande similarité avec l’albumine et lie les acides gras (AG) polyinsaturés à chaîne longue dans la plupart des espèces. Cette propriété de transport des AG est impliquée dans la maturation du système nerveux de l’embryon et du fœtus.
Chez les rongeurs (rat, souris), l’AFP lie aussi les œstrogènes, surtout l’œstradiol-17ß (E2-17ß). Les concentrations sériques maternelles d’AFP sont élevées pendant la gestation chez de nombreuses espèces. Des concentrations non négligeables de cette protéine sont détectables en dehors de la gestation. Des taux sériques très élevés d’AFP peuvent être associés à des anomalies du système nerveux fœtal chez la femme par exemple ou encore à des cas de tumeurs hépatiques. La concentration d’AFP chez le fœtus bovin s’est révélée être de 6 mg/ml. L’importance physiologique de telles molécules dans le processus de gestation reste inconnue.
La PSPB est une protéine spécifique de la gestation. C’est une glycoprotéine acide de masse moléculaire apparente de 47 à 53 kDa et présentant des variants isoélectriques (pI 4,0 à 4,4). La PSPB n’a pas été caractérisée au niveau d’acides aminés à l’époque de sa découverte. Cependant, il a été rapidement montré que cette protéine est présente dans le sang maternel et que son dosage pourrait permettre un diagnostic de gestation chez les femelles de nombreuses espèces de ruminants. A la même époque, une glycoprotéine de masse 30 kDa a été isolée et a été nommée bCG (bovine chorionic gonadotropin). Par la suite, cette protéine a été considérée comme faisant partie de la famille des glycoprotéines spécifiques ou associées à la gestation et a été dénommée boPAG-2.
La PAG est une glycoprotéine acide de masse moléculaire 67 kDa. Elle présente 4 isoformes de pIs 4,4, 4,6, 5,2 et 5,4. Des expériences par clonage moléculaire ont montré qu’une forme de 64 kDa de la PSPB est par sa structure primaire, apparentée à la boPAG-1. Aujourd’hui dans les banques génomiques, la boPAG-1 et la PSPB sont considérées comme étant la même molécule. De même, les séquences terminales des antigènes SBU-3 présentaient des identités avec les PAGs connues à l’époque. Il en est probablement de même pour la PSP-60.
Les PAGs les mieux connues aujourd’hui sont synthétisées par les cellules binucléées présentes dans les couches superficielles du trophectoderme, et plus précisément dans les granules de cellules binucléées. Plusieurs membres de la famille des PAGs sont exprimés dans les cellules du trophectoderme dès le stade d’élongation du blastocyste.
Dès le début de la gestation, le placenta synthétise toute une série de protéines spécifiques ou associées à la gestation. Les protéines associées à la gestation (PAG) sont facilement détectables dans le sang dès le 20ème jour après fécondation (Figure 5) et dans le lait, à partir du 32ème jour. Il n’est pas nécessaire de connaître ni de tenir compte de la date de saillie pour autant qu’un délai minimum de 22 jours sépare la dernière fécondation possible de la date de prélèvement du sang et d’un minimum de 32 jours pour le lait. Dans ces conditions, pour un test sanguin, après 22 jours, la spécificité est de 100% (exactitude d’un test négatif) et la sensibilité de 94%. Ces 2 paramètres passent respectivement à 100% et 99 % à partir du 29ème jour. Le dosage de PAG permet aussi de dénombrer les fœtus mais seulement plus tard dans la gestation (84ème jour au moins).
Le dosage des PAG dans le lait a été testé dans le but de rendre le prélèvement de l’échantillon accessible à l’éleveur. Les résultats ont montré que les concentrations des PAG dans le lait permettent de diagnostiquer l’état de gestation à partir du 32ème jour de gestation. Le coût de l’analyse, qui est de 30 à 50 Dh actuellement est susceptible de diminuer lorsque l’ELISA et un test simplifié entreront en application.