Quelle stratégie adopter pour valoriser en croisement la race D’man en dehors de l’oasis ?
Pour exploiter les atouts de la race D’man (prolificité, déssaisonnement) tout en évitant ses difficultés d’adaptation au pâturage dans les zones agricoles favorables, deux stratégies ont été étudiées à l’INRA pour exploiter une femelle avec 50% de gènes D’man et 50% de gènes Timahdite.
Le croisement à double étage est intéressant à court terme pour valoriser la race D’man
Cette stratégie consiste à produire, en permanence au niveau de la ferme, des animaux croisés des 2 générations. D’abord, le bélier D’man est accouplé à des brebis de race locale Timahdite pour produire des femelles de 1ère génération (F1=DT) et ensuite ces dernières auront hérité en partie les aptitudes de la D’man, sont accouplées aux béliers d’une 3ème race améliorée pour produire des agneaux de 2ème génération (F2) tous destinés à la boucherie.
Dans nos conditions d’élevage, le croisement à double étage a permis la productivité la plus élevée (28,3 kg). La brebis croisée DT a réalisé une prolificité significativement supérieure à celle de la brebis locale Timahdite à la mise bas (+0,56) et au sevrage (+0,45 agneaux). Elle a permis une productivité pondérale supérieure de +8, +6 et +5 kg respectivement sur l’élevage Timahdite et D’man pur et sur le croisement industriel simple. En outre, l’agneau croisé DT (F1) issu du 1er étage a réalisé des performances appréciables voire supérieures à celles de l’agneau Timahdite pur, soit de +12 et +9 g/j respectivement pour le gain moyen quotidien (GMQ) pré-sevrage et à l’engraissement.
La surface du muscle longissimus dorsi a été également supérieure de +1 cm² comparée à l’agneau Timahdite (Figure 7, voir fichier PDF). Toutefois, les agneaux contenant les gènes D’man déposent plus de gras (Figure 8, voir fichier PDF). Compte tenu du mode de payement et de classification actuel de la carcasse entière au niveau de l’abattoir, la commercialisation des agneaux mâles DT issus du double étage se fera sans difficultés. Quant aux agnelles DT, étant prolifiques, elles n’auront pas de problèmes de débouchés et seront utilisées dans les élevages de croisement industriel pour augmenter la productivité numérique.
Par conséquent, le croisement à double étage reste, à court terme, une solution intéressante et vivement recommandable quand le contrôle et la maîtrise des accouplements sont possibles. En effet, le croisement à double étage est difficile à gérer au niveau d’un seul élevage ce qui limite son développement puisqu’il nécessite la conservation des races parentales et la production régulière de brebis croisées (DT).
La création de race synthétique DT constitue une alternative pour valoriser la prolificité de la D’man
Cette stratégie consiste à créer, par le croisement de métissage, une nouvelle population composite à partir des races D’man et Timahdite avec chacune 50% dans le croisement. La race synthétique DT sera plus adaptée aux besoins des éleveurs puisqu’elle peut être gérée comme une race locale au niveau des zones agricoles et le renouvellement des reproducteurs ne posera pas de problèmes comme dans le cas du double étage.
La première phase de création de la race synthétique consiste à réaliser des accouplements entre les races D’man et Timahdite aussi bien en tant que race de mâle que de femelle pour la production des animaux F1, puis à laisser les croisements se dérouler sur quatre générations. Durant cette phase, pratiquement aucune sélection n’est opérée pour favoriser les combinaisons génétiques. La 2ème phase est l’étape de caractérisation des animaux de la nouvelle population pour déterminer les caractères spécifiques à fixer et à sélectionner, notamment dans le cadre d’une structure professionnelle organisée.
Les premiers résultats enregistrés à l’INRA sur les animaux DT issus des différentes générations F1 à F3 montrent que la prolificité à la mise bas reste élevée (Figure 9, voir fichier PDF) avec une même tendance pour la productivité pondérale (Figure 10, voir fichier PDF). La tendance à la baisse entre les générations F1 à F3 peut être due à une légère perte d’hétérosis mais surtout au fait que les brebis des générations F3 et F2 sont à majorité des jeunes brebis. Ces résultats confirment aussi que la brebis D’man performe peu dans les conditions de pâturage en comparaison avec la femelle demi-sang D’man.