Comportement et choix du matériel végétal
Variétés
Le matériel végétal en culture est constitué exclusivement de variétés étrangères et la gamme n’a cessé d’évoluer en gardant comme variété de base Golden Delicious (GD) et ses pollinisatrices Starking Delicious (SD) et Starkimson (SK). Malgré que GD soit exigeante en froid (1000 heures), elle possède une certaine souplesse d’adaptation lui permettant d’être cultivée dans différentes situations avec cependant d’inégales performances.
La nécessité de répondre à des préoccupations d’étalement du calendrier de production, de qualité ou d’introduction de variétés moins exigeantes en froid et adaptées aux conditions climatiques a conduit l’INRA a entreprendre une série d’expérimentations relatives à l’évaluation du matériel végétal (34 variétés et 5 porte-greffes), à la caractérisation de la dormance (déroulement et intensité), aux modes de fructification et à la caractérisation pomologique. Les variétés et les porte-greffes ont été introduits de différents pays et les essais ont été installés au niveau des Domaines Expérimentaux de l’INRA d’Ain Taoujdate (hiver relativement doux) et de Laânaceur (climat de montagne) afin de proposer des variétés pour chaque milieu.
Des observations complémentaires ont été effectuées dans des vergers privés sur les variétés déjà en culture afin de mieux comprendre leur réaction aux milieux et identifier des critères d’adaptation pouvant servir comme indicateurs dans le diagnostic du comportement du matériel végétal.
Dans les zones de moyenne altitude (500-800 m), des différences importantes de comportement existent entre les variétés et sont à mettre en relation avec leurs origines génétique et écologique. La chute des feuilles, indicateur d’une entrée en dormance, se fait tardivement et d’une manière étalée. Ce comportement est lié au rythme de croissance et à la chronologie de l’apparition des feuilles. Chez la variété Anna, la reprise d’activité après récolte donne lieu à des feuilles d’âges physiologiquement jeunes dont la sénescence est tardive. La cinétique de leur chute suit un gradient allant du vieux bois aux parties jeunes dont les bourgeons entrent en dormance plus tardivement.
L’époque du débourrement est liée aux besoins en froid des variétés. Sur un même génotype, la reprise de l’activité végétative se produit en premier lieu sur les spurs et les bourgeons terminaux des rameaux. Ces bourgeons seraient moins exigeants en froid que les bourgeons latéraux. Le débourrement avancé des bourgeons terminaux traduit le phénomène d’inhibition corrélative et conduit à l’installation de la dominance apicale. Celle-ci favorise la formation des pousses vigoureuses plutôt que le développement des spurs qui constituent le support potentiel de production. Ce schéma d’évolution caractérise les variétés mal adaptées dont les arbres sont dégarnis et généralement moins ramifiés.
La répartition des organes de production montre que les dards et les brindilles constituent le support préférentiel de fructification pour toutes les variétés. Les bourses ne sont produites en proportions élevées que sur le bois âgé de 3 ans, les lambourdes sont les moins fréquentes quelque soit l’âge du bois. En revanche, les brindilles sont assez fréquentes aussi bien sur le bois âgé de 2 ans que sur celui de 3 ans et constituent le second support de fructification. Ces éléments donnent une idée sur le comportement typique du pommier en zone de moyenne altitude; où le froid reste insuffisant pour satisfaire les exigences de l’espèce.
La quantification des organes de production pour chaque variété est donc un élément permettant de juger ses possibilités de fructification. Une déficience en spurs serait donc liée à une mauvaise adaptation variétale aux conditions du milieu.
Dans une région où il y a une déficience en froid, le déroulement des stades phénologiques est aussi affecté chez les variétés mal adaptées. La dormance des bourgeons des cultivars de base GD et SD, est peu profonde et difficile à surmonter. La charge en coursonnes est déficiente et le déroulement des stades phénologiques est perturbé. La dominance apicale est très marquée et le débourrement des bourgeons latéraux est retardé et hétérogène.
L’évolution de ces bourgeons peut même être erratique pour ne donner que des pousses végétatives, contrairement à ce qui se fait habituellement, et l’indice de floraison est très faible. Cette anomalie de développement peut conduire à une baisse considérable des rendements et traduit la forte sensibilité de cette espèce d’origine tempérée aux changements climatiques, notamment durant l’époque d’induction et de différenciation florale.
La production qui en découle est de moindre qualité et sa durée de conservation est également réduite. La nécessité de cultiver le pommier en dehors des zones où le climat est favorable, impose le choix de variétés précoces moins exigeantes en froid pouvant s’accommoder au milieu comme Anna et Dorset Golden. Ces variétés lèvent leur dormance sous l’effet de 200 à 300 heures de froid (T°<7.2°C). Leur floraison débute à partir de la 2ème décade de février et peut s’étaler jusqu’à mi-mars. Leur pollinisation peut être assurée par la variété Ein Shiemer. Anna arrive à maturité à partir de la 1ère semaine de juillet. Le fruit est de calibre moyen (80 à 120 g) avec une couleur généralement striée ou rouge sur fond vert-clair d’importance variable.
La maturité de Dorset Golden est tardive d’environ 10 jours avec un fruit qui ressemble à celui de GD et dont la couleur est vert-jaunâtre. Le fruit peut être conservé 4 à 6 semaines lorsque les prix pratiqués sur le marché sont faibles.
Dans les zones de transition vers la montagne, les variétés semi-précoces Ozarkgold et Royal Gala sont parfaitement adaptées et leur maturité arrive pour combler un vide dans le calendrier de production. Elles donnent respectivement des fruits de couleur jaune-claire et rouge carmin légèrement striée. Leur texture est croquante et l’écoulement sur le marché est aisé.
Dans les zones de montagne, le pommier forme plus de spurs et de brindilles, indicateur d’une bonne adaptation au milieu. Sa floraison est relativement groupée et la production est meilleure. Au cours de la maturité des fruits, la disparition rapide de la chlorophylle cède la place à une coloration plus intense. Les températures modérées et les fortes amplitudes thermiques favorisent la synthèse des pigments responsables d’une bonne coloration, surtout rouge. Le fruit est ferme, croquant et plus parfumée à pleine maturité. Dans ces conditions, la gamme usuelle formée de GD et SD est à élargir avec la variété Red Chief, Golden Smoothée et même Gloster. Une tendance à une forte demande de fruits de couleur rouge existe, ce qui indique que les plantations futures doivent être basées sur les variétés colorées.