Etant donnée la grande richesse des sols des Doukkala en phosphore et la quasi-absence de réponse de la culture à cet élément, l’influence de la fertilisation sur la qualité de la betterave s’est focalisée sur l’azote et le potassium. Les effets de N, K et NxK sur la qualité sont illustrés à travers la richesse saccharine, les éléments mélassigènes (Na aminé, K+, Na+), la pureté du jus de pression et le rendement sucre extractible.
Richesse saccharine et fertilisation N x K
Sans apport de potassium, l’azote réduit fortement la richesse saccharine. Chaque apport de 100 kg N/ha cause une diminution moyenne de la richesse de 0,62 %. Des corrélations similaires ont été trouvées, même si le potassium est apporté. Cependant, pour la même dose d’azote, le potassium améliore la richesse saccharine. A titre d’exemple, la figure 1 (voir fichier PDF) illustre l’influence positive de K2O apporté sur la richesse saccharine à forte dose d’azote. Cette amélioration semble se stabiliser entre 300 et 450 kg de K2O/ha.
Le rendement en sucre brut est le produit entre le rendement racines et la richesse saccharine. De ce fait, l’apport excessif d’azote aura tendance à réduire le rendement sucre brut. Par contre, avec son effet positif, le potassium anéanti l’effet négatif de l’azote en maintenant une richesse saccharine convenable.
Eléments mélassigènes et fertilisation N x K
L’extraction du sucre brut est influencée par une combinaison linéaire des teneurs dans la râpure en Na aminé, K+ et Na+ (en méq/100g). La quantité de sucre mélasse (non extractible) est reliée aux éléments mélassigènes par la formule empirique établie par Hachimi (1984):
Sm = 5,67 + 0,091 Naa + 0,34 Na + 0,16 K
Toute pratique faisant augmenter les teneurs de l’un ou de l’ensemble de ces 3 éléments agira négativement sur le rendement en sucre extractible.
N a aminé et fertilisation N x K
Globalement, la fertilisation azotée fait augmenter la teneur de la râpure en Na aminé (Figure 2) (voir fichierr PDF). Il est observé que les teneurs les plus élevées sont obtenues avec les apports de potassium les plus faibles. La fertilisation potassique réduit significativement la teneur en N a aminé. Ce taux de réduction est en moyenne de 0,08 méq/100g pour chaque apport de 100 kg de K2O/ha.
K+ et fertilisation N x K
L’azote n’a pas eu d’effet significatif sur la teneur de la râpure en K. Par contre, l’apport de potassium fait augmenter cette teneur (Figure 3) (voir fichier PDF). Cependant, la teneur en K dans la râpure n’atteint que rarement 5 méq/100g. Chaque 100 kg de K2O apporté/ha augmenterait la teneur du K dans la râpure d’environ 0,13 méq/100g.
Na+et fertilisation N x K
Il y a une tendance globale à l’augmentation du Na+ suite à l’apport d’azote lorsque le potassium n’est pas apporté. La concentration en Na+ varie de 2 à 5,5 méq/100g. La fertilisation potassique réduit considérablement la teneur du Na+ dans la râpure (Figure 4) (voir fichier PDF). Le taux de réduction est en moyenne de 0,27 méq/100g pour chaque 100 kg de K2O apporté/ha.
Il se dégage de cette analyse que l’azote, à forte dose, fait augmenter les concentrations en Na aminé et en Na+ dans la râpure et de ce fait augmente le sucre mélasse. Par contre, le potassium agit positivement sur la qualité en diminuant les concentrations en Na aminé et en Na+ dans la râpure. L’augmentation de la concentration en K dans la râpure suite à l’apport de K2O est relativement moins importante que la diminution des deux autres éléments mélassigènes.
Pureté du jus de pression et fertilisation N x K
La fertilisation potassique améliore la pureté du jus de pression pour chaque dose d’azote apporté tandis que l’azote réduit considérablement la pureté (Figure 5) (voir fichier PDF). Sans apport de potassium, l’azote réduit en moyenne la pureté du jus de 89 % pour N150 à 84 % pour N450. L’apport de 600 kg de K2O/ha fait gagner 3 % en pureté pour N150 et seulement 2 % pour N450. Cette augmentation de la pureté suite à l’apport du potassium s’ajuste parfaitement à un modèle polynomial du 2ème degré.
Rendement sucre extractible et fertilisation N x K
Le paramètre synthétique permettant de juger de la qualité technologique de la betterave est le rendement sucre extractible. Il est la résultante des effets positifs et négatifs sus-présentés. Il traduit la quantité de sucre produite par hectare.
Sans apport de K2O, le rendement sucre extractible est relié à la dose d’azote apportée par une relation polynomiale. Le maximum moyen se situe entre 200 et 300 kg N/ha. Pour chaque dose d’azote apportée, le potassium améliore considérablement le rendement sucre extractible. Le maximum se situe entre 400 et 500 kg K2O/ha. L’effet dépressif de l’azote sur le rendement en sucre extractible, en interaction avec le potassium, se manifeste clairement dans la figure 6 (voir fichier PDF). Aux traitements K450 et K600, l’effet de l’azote est très limité. Par contre, aux apports faibles de potassium (K150 et K300), l’effet négatif de l’azote est plus apparent. Sans fertilisation potassique, l’azote réduit fortement le rendement sucre extractible.
Conclusion
Les travaux sur la fertilité des sols et la fertilisation de betterave dans les Doukkala montrent de manière très claire l’effet négatif des fortes doses (> 260 kg/ha) de l’azote sur la qualité de la betterave produite. Le potassium améliore considérablement la qualité. Des doses de 400 à 500 kg de K2O/ha sont nécessaires pour produire de hauts rendements en sucre extractible.
Il est recommandé de revoir le mode de paiement des producteurs de la betterave en se basant sur le rendement sucre extractible ou sur les teneurs en éléments mélassigènes et non pas seulement sur le rendement racines et la richesse saccharine. Les concentrations en Na aminé, en Na+ et/ou en K+ de la râpure seraient de bons indicateurs de la qualité.
M. BADRAOUI (Coordinateur)
B. SOUDI, M. AGBANI
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II
M. EL GHAROUS et M. KARROU
Institut National de la Recherche Agronomique