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mercredi, décembre 4, 2024

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Problématique de gestion de la matière organique des sols des périmètres irrigués

Restitution de la matière organique par les résidus de culture

Dans le but d’analyser quantitativement les causes de déperdition de la matière organique des sols, l’étude menée récemment dans le périmètre des Doukkala, a concerné la détermination des teneurs en matière organique dans 21 situations contrastées des points de vues type de sol, système de culture et mode d’irrigation. Il a été procédé à l’analyse dans l’ensemble de ces sites, des les teneurs en matière organique des sols, des quantités de matière organique fraîche restituées au sol après différents précédents culturaux, et de la teneur en carbone organique des différents résidus de culture.

Le tableau 2 (voir fichier PDF) montre les quantités de matière organique fraîche restante à la surface du sol après différents précédents culturaux. La quantité maximale de résidus laissée à la surface du sol par la culture du blé est de 2,37 t/ha suivie de 1,41 t/ha pour la betterave à sucre et de seulement 0,43 t/ha pour le cas du maïs grain. Les autres cultures occupent des places intermédiaires. Ajoutons que ces quantités ne restent pas intégralement sur le sol car une grande partie est exportée hors parcelles surtout pour le cas des feuilles et collets de la betterave. Si on considère que la totalité de ces matières sont enfouies au sol, on peut calculer sur la base du taux moyen annuel de minéralisation de l’humus estimé plus haut qui est de l’ordre de 2,55, d’une teneur moyenne des sols étudiés en matière organique de 1,5 % et d’un taux d’humification maximal de 40 %, des taux de compensation de l’humus détruit annuellement qui sont de 84 %; 50 % et 15 % respectivement pour les précédents culturaux blé, betterave sucrière et maïs.

Dans le but d’examiner l’aptitude d’humification des matières organiques fraîches restituées, il a été procédé à l’analyse du carbone organique dans les différents résidus de récolte (tableau 2). Ainsi, il s’est avéré que les résidus de la culture du blé présentent la valeur maximale de 45,5 % de carbone contre 35,6; 33,5 % et 3,2 respectivement pour le soja, le maïs et la betterave sucrière. Ces analyses permettent de classer ces résidus selon leur pouvoir humificateur qui est proportionnel à leur teneur en carbone. On peut aussi en déduire que les résidus de récolte riches en carbone peuvent immobiliser une partie de l’azote minéral résiduel. Ceci pourrait être considéré avantageux dans la mesure où l’azote minéral, surtout sous forme nitrique, échappe à la lixiviation suite aux pluies hivernales percolantes.

Degré d’intensification, mode d’exploitation du sol et matière organique

Malgré les liens constitutionnels entre la matière organique et certains propriétés intrinsèques du sol, comme sa teneur en argile, l’histoire culturale et le degré d’intensification agricole ont des effets plus marqués sur la dynamique de la matière organique. Ceci peut être illustré par le tableau 3 (voir fichier PDF) relatant les données d’analyses de quelques composantes dynamiques de la matière organique.

Lorsqu’on compare ces deux sols, qui sont pédogénétiquement identiques, on constate que celui du Tadla est plus pauvre en matière organique et en azote. Ceci est attribué à la mise en valeur intensive qui n’est pas accompagnée d’une gestion adéquate des résidus de culture. En effet, dans la plupart des périmètres irrigués, et particulièrement le Tadla et les Doukkala à vocation betteravière, les résidus de récolte sont généralement exportés des parcelles. Ajoutons, que la température et l’irrigation assurent des conditions thermiques et hydriques optimales pour la minéralisation. Ce phénomène est amplifié par les travaux de sol fréquents qui augmentent l’accessibilité de la matière organique à la biodégradation.

Les faibles teneurs en azote chimiquement hydrolysable et en acides aminés dans la zone irriguée de Tadla, montrent une tendance à l’épuisement de la forme facilement biodégradable de l’azote organique. En effet, les défaillances de gestion des résidus de récolte ne permettent pas une réalimentation de ces pools de matière organique. La faible teneur en ammonium non échangeable du sol IVT comparé à son homologue de la Chaouia, demeure aussi un excellent indicateur de la mise en valeur intensive. En effet, le processus de nitrification intense en sol irrigué et la mobilisation importante d’azote minéral déplacent l’équilibre vers la libération de l’ammonium fixé dans les positions interfoliares des argiles. Cette comparaison confirme que le type pédologique du sol ne peut pas à lui seul expliquer les tendances d’évolution de la matière organique et que le degré d’intensification et le mode d’exploitation du sol ont un impact non négligeable.

Répartition de la matière organique dans les fractions granulométriques

Il est aussi important de considérer dans les régions à vocation betteravière étudiées, une autre voie de perte de matière organique qui réside dans les tares de terre collées à la betterave sucrière pendant la période d’usinage. Ces pertes doivent être théoriquement corrélées à la proportion de matière organique dans les particules fines.

Pour cela, il a été procédé à une quantification des teneurs en matière organique dans les fractions granulométriques situées entre 0,05 et 2 mm.

Les résultats ont montré que la teneur en matière organique a pu atteindre 2,47% pour les fractions de diamètre inférieur à 0,10 mm. Ces fractions englobent les limons grossiers, les limons fins et les argiles.

Lorsqu’on exprime cette répartition en courbes cumulatives, on constate que 60% de la matière organique de ces sols est concentré dans des particules de sol les plus fines dont le diamètre est inférieur à 0,25 mm. Toutes les courbes coïncident ce qui confirme la consistance de cette tendance à travers les types de sols de la région.

Si on considère un tare de 5 % (données de la Profession Sucrière du Maroc), la superficie betteravière annuelle de 20 000 ha dans le périmètre irrigué des Doukkala, entraîne au moment de l’usinage une perte d’environ 22 000 tonnes de sol. Ainsi, sur la base d’un taux moyen de 1,5 % de matière organique et d’une proportion de 60 % de matière organique dans les particules fines, on peut calculer une perte annuelle de matière organique d’environ 450 tonnes soit l’équivalent de 0,023 % par hectare et par an. Ce phénomène devrait être quantitativement plus important dans les régions tempérées où la récolte de la betterave sucrière s’opère sous des conditions de sol humide.

Conclusion

Il ressort des observations effectuées que la teneur en matière organique dans les sols soumis à l’intensification agricole, particulièrement les zones irriguées, subit une perte importante. Ceci se traduit par une détérioration de la fertilité physique et chimique des sols. Ainsi, des efforts de sensibilisation des organismes de développement agricole et des agriculteurs méritent d’être déployés.

Le compostage des résidus de récolte et du fumier constitue une bonne alternative pour améliorer la fertilité physique et chimique des sols.

Dr. Brahim SOUDI et F. NAAMAN
Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II

Activités du projet ConserveTerra

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