INTRODUCTION
Le Maroc est importateur de céréales depuis le début des années soixante. Le rendement moyen enregistré actuellement oscille autour de 11 q/ha. Il est loin de répondre aux besoins d’une population sans cesse croissante et loin du potentiel moyen (20 q/ha) qu’offre l’environnement de production. Toute tentative d’augmentation de cette production doit considérer le besoin urgent d’améliorer significativement le peuplement pieds à la levée qui fait actuellement grand défaut et qui est déterminant pour l’élaboration du peuplement épis et par conséquent du rendement en grains. Malgré les grands efforts fournis par le Ministère de l’Agriculture pour redresser cette situation, les récents changements climatiques et la poussée démographique ont rendu cette tâche très difficile. C’est ainsi, la forte poussée démographique que connaît le pays depuis les 3 dernières décennies, nécessite l’extension et l’élargissement de l’environnement de production céréalière à d’autres régions semi-arides et arides où l’eau est généralement facteur limitant par la quantité et la disponibilité (répartition) durant le cycle de production de la culture.
Durant cette même période, le climat a subi une évolution relativement défavorable avec une grande variabilité dans les précipitations aussi bien intra que inter-annuelles. Malheureusement, les techniques de production utilisées pour la relance de la mise en valeur dans ces nouveaux milieux de production n’ont généralement pas tenu compte de ces changements dans le milieu et le climat.
Ainsi, l’approche traditionnellement utilisée en matière de préparation du sol, aussi bien par les agriculteurs que par les chercheurs/développeurs dans les milieux irrigués ou très favorables, ne peut être appliquée avec succès dans les milieux semi-arides et arides où la variation du facteur eau est très importante et très peu prévisible. L’utilisation des systèmes « conventionnels basés sur la combinaison d’outils à disques pour accomplir des perturbations (« retournements ») primaires, souvent partielles et hétérogènes, suivies de multiples passages de reprises et associés dans 60 à 80% de semis à la volée, ne peuvent être extrapolés aux milieux semi-arides et arides sans nuire à la rentabilité, à la production et à la productivité.
QUEL RAISONNEMENT PEUT-ON UTILISER ?
Différentes approches sont utilisées pour raisonner la préparation des sols pour les cultures:
- Une approche très simpliste qui ne tient compte ni du milieu pédo-climatique, ni des systèmes de culture pratiqués, ni de l’espèce ou de la variété à cultiver. C’est l’approche la plus utilisée surtout pour les céréales, les légumineuses et les cultures de remplacement comme le tournesol et les cultures fourragères.
- Une approche restreinte qui considère la technique de travail du sol comme une simple succession d’outils qui n’intègre aucune notion de management, notamment de résidus organiques, ni l’utilisation d’autres technologies (contrôle chimique des adventices). C’est une approche incomplète qui ne facilite pas l’introduction de nouvelles technologies. Par exemple, l’introduction du travail de conservation (« conservation tillage ») basé sur l’utilisation du chisel ou du semis direct n’a pas connu de succès malgré le grand potentiel de son utilisation existant dans les zones semi-arides et arides du pays.
- Des approches intermédiaires résultant de l’association partielle des 2 approches citées ci-dessus.
- Une approche globale ou « approche système » qui considère la technique de travail du sol comme un système dont la séquence d’outils ne constitue qu’une composante, elle même raisonnée entre autres sur la base des exigences de la culture en matière de travail du sol.
En effet, cette approche que nous utilisons considère les exigences des cultures en matière de travail du sol comme étant la charpente déterminant l’état structural principal autour duquel s’articulent d’autres exigences qui ne manquent pas d’importance agro-économique. La préparation du sol, pour une culture dans une parcelle donnée, doit donc aboutir à la création d’états structuraux dont l’évolution doit répondre aux exigences de différentes composantes:
- Exigence propres à la culture (charpente principale) qui obligatoirement doit associer à la fois l’installation et l’élaboration du rendement final. En d’autres termes, la préparation du lit de semence ne peut être dissocié de la préparation de l’ensemble du profil cultural.
- Des exigences évaluées à partir de l’état structural initial dans lequel se trouve la parcelle à cultiver au moment de réaliser le travail primaire (passage du premier outil). Bien entendu, cet état est le résultat de l’effet cumulatif de l’histoire culturale dont le précédent cultural et l’interaction pédo-climatique avec la conduite de la parcelle, après la récolte du précédent. Le résultat d’évaluation de cet état (favorable ou défavorable) est pris en compte dans le raisonnement global de la création du profil structural à mettre en place.
- Des exigences pour réaliser des objectifs souvent ignorés ou superficiellement considérés dans le raisonnement global. Ces objectifs sont généralement qualifiés de secondaires; alors que selon des situations, certains de ces objectifs peuvent même déterminer le choix de l’espèce ou de la variété. Il s’agit de:
- La conservation de l’eau: élément important dans la réussite du peuplement à la levée et de l’élaboration du rendement, surtout dans les régions céréalières qui sont souvent situées en zone semi-arides et arides.
- La conservation du sol qui prend de l’importance dans les terrains en pente comme le Saïs, Zaer, et les collines pré-rifaines.
- La nécessité de gérer différemment le devenir des résidus organiques selon des stratégies (encore absentes chez la majorité de nos agricultures) de conservation (eau, sol, productivité) qui n’exclut pas l’intensification ou la coexistence d’une production mixte, végétale et animale.
- Faut-il enfouir ces résidus profondément, les mélanger ou les laisser partiellement ou totalement en surface? Le système de travail du sol doit tenir compte de l’objectif fixe.
- La mise en place dans le profil cultural des produits organiques et/ou chimiques de pré-émergence (fumier, fertilisants chimiques, insecticides, herbicides) doit également être intégrée comme exigence à combler par le système de préparation du sol.
C’est la prise en considération de l’ensemble de ces composantes qui détermine l’élaboration de la préparation du sol devant répondre aux exigences d’une culture dont celles relatives à son installation.