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Effet de l’irrigation sur la reprise des jeunes plants d’arganier après transplantation au terrain

Effet de l’irrigation sur la reprise des jeunes plants d’arganier après transplantation au terrain

A. WIFAYA, A. MIMOUNI, F. MOKRINI

Institut National de la Recherche Agronomique (INRA), UR-Production intégrée des cultures, CRRA-Agadir-Maroc

Résumé

Le présent travail de recherche s’inscrit dans le cadre du programme de recherche d’appui au ‘’Projet Arganier’’. Il est coordonné par l’association Agrotechnologies du Souss-Massa-Draa (Agrotech) en partenariat avec un consortium de chercheurs sur l’arganier. Ce travail a pour objectif de déterminer les doses et fréquences d’irrigation favorables pour une meilleure reprise des plants d’arganier après transplantation sur trois sites appartenant à des zones agro-climatiques différentes; Taksbite sur un plateau à climat océanique, Anzad sur un piémont de montagne à climat continental et Tinzert à géographie et climat montagneuse. Les résultats de ce travail ont montré que la dose de 16 L/plant et la fréquence d’un mois sont recommandées sur le site de Taksbite. Cependant, sur le site d’Anzad, ces résultats ont démontré que la dose de 36 L/plant et les deux fréquences; 1 et 2 mois sont conseillés. De même, la dose de 35 L/plant et la fréquence de 2 mois se sont montrées plus efficientes sur le site de Tinzert. Enfin, cette expérimentation a mis en évidence l’existence d’une grande hétérogénéité au sein de cette population, due principalement à sa grande diversité génétique et son adaptation aux conditions agro-climatiques de chaque site de plantation.

Mots-clés: Arganier, irrigation, régénération.

Effect of irrigation on recovery of young argan plants after transplanting to field

Abstract

This work is part of the research program supporting the ‘’ Argan Project ‘’. It is coordinated by the Agrotechnologies Association of Souss-Massa-Draa (Agrotech) in partnership with a consortium of researchers on the argan tree. The purpose of this work is to determine the favorable doses and frequencies of irrigation for a better recovery of argan plants after transplantation in three sites belonging to different agro-climatic zones; Taksbite on an ocean climate plateau, Anzad on a mountain foothill with continental climate and Tinzert with a mountain geography and climate. The results of this work showed that the dose of 16 L/plant and the frequency of one month are recommended for the Taksbite site. However, on the Anzad site, results demonstrated that the dose of 36 L/plant and both frequencies, 1 and 2 months, are recommended. Similarly, the dose of 35 L/plant and the frequency of 2 months were more efficient at the Tinzert site. Finally, this experiment revealed the existence of a great heterogeneity within argan population mainly due to its great genetic diversity and its adaptation to the agro-climatic conditions of each plantation site.

Keywords: Argan tree, irrigation, regeneration.

INTRODUCTION

Le programme de recherche d’appui au ‘’Projet Arganier’’, financé par l’Agence de Développement Social et l’Union Européenne, est mis en œuvre et coordonné par l’association Agrotechnologies du Souss-Massa-Draa (Agrotech). L’Association Agrotech collabore avec un consortium de chercheurs de plusieurs institutions nationales de recherche sur l’arganier: Institut Agronomique et Vétérinaire Hassan II, Complexe Horticole d’Agadir; Faculté des Sciences-Université Ibn Zohr d’Agadir; Institut National de Recherche Agronomique d’Agadir; la Faculté des Sciences Ben M’Sik de Casablanca-Université Hassan II, Mohammedia et la Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université Mohammed V de Rabat.

L’arganier (Argania spinosa L.) constitue une importante essence forestière au Maroc. Ses 20 millions d’arbres sont étendus sur une superficie évaluée à 800 000 ha au Sud-Ouest du Maroc. L’arganeraie joue, en plus de son rôle de barrière contre le désert, un rôle socio-économique majeur. Elle procure annuellement environ 800 000 journées de travail et elle assure au quotidien la subsistance de 3 millions de personnes dont la majorité vit en milieu rural (Charrouf et Guillaume, 2007). Aujourd’hui, la pérennité de cet écosystème est menacée, en raison de la surexploitation domestique, de l’extrême aridité des dernières décennies et surtout du faible taux de régénération naturelle de l’arganier. En effet, la superficie de l’arganeraie diminue d’environ 600 ha par an et la densité moyenne en arbres est passée en un siècle de 100 à 30 arbres par hectare. Afin d’inverser cette tendance, la préservation de cette ressource passe inéluctablement par la régénération et le développement de l’arganier agricole, qui vise la diminution de la pression de l’exploitation de l’arganeraie.

En ce sens, le Plan Maroc Vert place la filière de l’arganier parmi les priorités nationales, à travers l’établissement du Contrat Programme de la filière arganier. Celui-ci prévoit, d’une part, le développement de l’arganier agricole, en assurant la plantation de 5000 ha, à l’horizon 2020, et d’autre part, la restitution de 200 000 ha de l’arganeraie.

Exigence climatique de l’arganier

L’arganier est un arbre thermophile et xérophile. La plus grande partie de l’arganeraie relève de l’étage infra méditerranéen, variante bioclimatique semi-aride à aride (El Aboudi, 1990). Le secteur semi-aride s’étend le long de la côte atlantique de Safi à Agadir, sur une bande de 60 km de large avec des précipitations allant de 290 à 400 mm et la température moyenne du mois le plus froid est comprise entre 3 et 7 °C.

Le secteur aride constitue les deux tiers de l’aire de l’arganeraie, dans la plaine de Souss et l’Anti-Atlas, avec une température moyenne du mois le plus froid supérieure à 7 °C et des précipitations moyennes annuelles comprises entre 150 et 300 mm (Peltier, 1982). L’arganier est éliminé dans les régions à pluviosité supérieure à 500 mm par la concurrence d’autres espèces ligneuses mieux adaptées et à croissance rapide (Maire, 1935).

Les précipitations occultes ainsi que certains facteurs de compensation ont une importance primordiale pour le développement de l’arganier. En effet, ces descripteurs écologiques peuvent constituer un apport d’eau supplémentaire pour la végétation (rosée, nébulosité, brouillard) et atténuer les phénomènes d’évapotranspiration (Bendâanoun, 1994).

L’arganier craint le gel. En effet, il est chassé par les températures de 0°C prolongées et ne tolère des températures négatives que si elles sont de courte durée. En revanche, il supporte remarquablement bien les températures élevées, celles-ci pouvant atteindre 50°C dans la région de Taroudant (Thierry, 1987).

C’est un arbre résistant aux fortes périodes de sécheresse prolongée et aux effets desséchants du vent. Ceci n’est pas lié au fait que cet arbre économise l’eau mais à sa capacité à puiser l’eau à de grandes profondeurs. De plus, pendant ces mêmes périodes de sécheresse, la croissance de certains rameaux est réduite (El Aboudi et al., 1991).

Physiologie de l’arganier

 Les études qui traitent la physiologie de l’arganier sont rares et demeurent insuffisantes pour comprendre les mécanismes internes qui contrôlent le développement de l’arbre et qui sont derrière sa plasticité et sa résistance aux divers types de stress. El Aboudi (1990) avait étudié plusieurs paramètres physiologiques relatifs au potentiel de l’eau (conductance stomatique, transpiration, etc.…) et leur interaction avec le potentiel hydrique du sol, l’éclairement, la température et l’humidité de l’air. Il a remarqué que la résistance stomatique minimale chez l’arganier est voisine de 200 sm-1 et que la régulation stomatique est incomplète au cours de la période sèche. La fermeture des stomates n’est observée que lorsque le potentiel hydrique foliaire tombe au-dessous de -3,5 MPa.

La transpiration maximale, pouvant atteindre 0,05 g cm-2 s-1 au début de la saison sèche et 0,03 g cm-2 s-1 au cours de cette saison, est relativement supérieure à celle d’autres arbres méditerranéens. El Aboudi, (1990) a suggéré que l’arganier n’est pas particulièrement économe d’eau bien qu’il soit pourvu de mécanismes susceptibles de freiner la transpiration. En se basant sur l’ensemble de ces indices, Peltier et al., (1990) ont parlé d’une éventuelle participation de réservoirs internes dans la régulation du déficit hydrique foliaire pendant la saison sèche. Ils ont suggéré que ces réservoirs sont situés entre le sol et le feuillage de l’arbre mais sans spécifier leur nature et leurs mécanismes de fonctionnement.

Le concept de nutrition de l’arganier a été étudié dans un seul travail actuellement disponible, c’est celui de Nerd et al., (1994), qui ont travaillé sur des arganiers âgés de 7 ans et plantés sous des conditions d’irrigation contrôlées dans deux localités différentes du désert de Negev en Palestine. Ils ont remarqué que les feuilles accumulent plus de sels minéraux que les tiges. La concentration en chlore, en calcium et en magnésium dans ces organes sont plus élevées lorsque l’eau d’irrigation est riche en ces éléments.

La comparaison des potentiels foliaires de base aux potentiels hydrique du sol à différentes profondeurs montre que les racines peuvent exploiter l’eau du sol à des profondeurs de plus en plus grandes au cours de la saison sèche. On peut conclure de ces caractéristiques éco-physiologiques que l’arganier n’est pas réellement adapté à la sécheresse, mais qu’il peut la supporter en ayant la capacité de puiser de l’eau à grande profondeur, que le tronc et les branches représentent probablement des réservoirs d’eau permettant de limiter la chute diurne du potentiel foliaire, et qu’il peut échapper à un stress hydrique intense (comme celui provoqué par le chergui, vent chaud et sec du Sahara), grâce à sa capacité de défoliation (EL Aboudi et al., 1991; El Aboudi. 1990).

Le système racinaire de l’arganier est très mal connu, en dépit de son importance pour l’alimentation en eau et en éléments minéraux de l’arbre. On sait que l’arganier possède un système racinaire de type pivotant, pouvant descendre à de grandes profondeurs; des chiffres de l’ordre de 30 mètres ont été avancés, mais on ne dispose pas de données fiables à ce sujet. En outre, l’arbre possède un réseau dense de racines superficielles ayant une bonne capacité de renouvellement, des racines fines apparaissant après chaque épisode pluvieux.

Enfin, ce n’est qu’en 1988 que les observations de Nouaïm et Perrin ont mis en évidence une symbiose racinaire de type endomycorhizienne (Nouaïm et al., 1990). Ces champignons symbiotiques à vésicules et arbuscules jouent très probablement un rôle dans la résistance de l’arbre à la sécheresse et dans sa nutrition minérale.

Effet du stress hydrique sur la croissance de jeunes plants d’arganier

Selon Reda Tazi et al., (2003) la diminution de la croissance de l’appareil végétatif observée chez les jeunes plantules d’arganier peut être expliquée par le fait que le polyéthylène glycol agit par augmentation de la pression osmotique du milieu, ce qui empêche l’absorption de l’eau par le système racinaire et par conséquent entraîne une réduction au niveau de la croissance de l’appareil végétatif.

Des effets similaires ont été remarqués sur la croissance de l’appareil végétatif chez les plantules d’arganier du sud-ouest du Maroc soumises à un stress hydrique en plein champ Harrouni et al., (1995). Les mêmes résultats ont aussi été obtenus sur la même espèce par Kaâbous (1992) in Harrouni et al., (1995). Selon Thakur et Rai (1982), le déficit en eau entraîne un retard dans la croissance végétale. Il se traduit par une réduction de la hauteur et du diamètre de la tige, un raccourcissement des entre-nœuds et une diminution du nombre de feuilles et de la surface foliaire (Aspinall, 1986).

D’autre part, Harrouni et al. (1995) ont montré que la transplantation des jeunes plantules d’arganier de quatre âges différents (1, 2, 4 et 6 mois) réagit mal vis-à-vis du déficit hydrique, alors que les plantules âgées de 22 mois ont, elles, donné un bon pourcentage de reprise (> 75 %) indépendamment du régime hydrique (Zahri et Harrouni, 1999). Selon Bouzoubaà et El Mourid (1999), la croissance des jeunes plantules d’arganier soumises au stress hydrique est différente selon les descendances.

La diminution de la croissance de la partie aérienne est accompagnée d’une réduction au niveau de la production des feuilles (Reda Tazi et al., 2003). D’autre part Harrouni et al., (1995) a déduit que la croissance végétative et particulièrement l’expansion des feuilles sont sévèrement inhibées par le stress hydrique, les nouvelles feuilles se développent lentement et la sénescence des anciennes s’accélère. L’effet de la sécheresse s’exprime par un ralentissement progressif puis rapide de la croissance primaire puisque le déficit hydrique réduit la turgescence et par conséquent le pouvoir expansif des feuilles.

D’après Reda Tazi et al., (2003), les concentrations élevées du polyéthylène glycol entraînent une diminution du poids sec des parties aérienne et racinaire. Il semble que la partie aérienne soit plus touchée par l’effet de PEG que la partie racinaire. La diminution de la croissance racinaire peut être expliquée par la subérisation des racines soumises au stress hydrique (Mougou, 1984). En revanche, il est connu que la résistance des végétaux à la sécheresse dépend du degré d’exploitation du sol par le système racinaire.

Pour l’arganier, son système racinaire couvre une surface qui peut atteindre 67 m2 (Thierry, 1987). Donc, les plantes adultes réagissent vis-à-vis du stress hydrique par le développement du système radiculaire alors que dans notre cas, les jeunes plantules d’arganier tendent à réduire la longueur des racines pour surmonter l’effet du stress hydrique provoqué par le PEG, ce qui explique la reprise élevée des plantules âgées de 22 mois (Zahri et Harrouni, 1999).

Généralement, le taux de régénération reste non satisfaisant pour les nouvelles plantations. En effet, les programmes de recherche sont appelés à explorer toutes les voies possibles pour l’amélioration de la régénération depuis l’élevage des plants jusqu’à la réalisation des plantations au terrain.

Ce travail de recherche s’inscrit dans le cadre du programme de recherche d’appui au projet arganier. Il a pour objectif de déterminer la dose et la fréquence d’irrigation adéquates pour une amélioration du taux de reprise des plants d’arganier au terrain après transplantation.

Source sur Revue Marocaine des Sciences Agronomique et Vétérinaires et ficher PDF
https://www.agrimaroc.org

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