MÉTAPHYLAXIE
La métaphylaxie, au sens européen du terme, consiste à traiter l’ensemble d’un lot (malades, sains ou en incubation) au-dessus d’un certain seuil de morbidité. Elle vise donc à empêcher l’apparition de nouveaux malades (Catry et al., 2008). Elle est à nuancer de la «metaphylaxis» nord-américaine qui répond parfois à la définition suscitée mais peut également signifier traitements de masse ou «mass medication» (Step et al., 2007). La décision d’avoir recours à la métaphylaxie doit absolument être réfléchie et entreprise après avis du vétérinaire à cause des risques liés à l’usage abusif et incontrôlé des antibiotiques menant inévitablement à l’apparition d’antibiorésistance. L’instauration d’un programme de métaphylaxie doit être justifiée économiquement. Il est à recommandé de le mettre en œuvre à partir de 10 % de morbidité dans les élevages de plus de 50 jeunes bovins. Un seuil d’alerte plus bas chez les veaux de seulement 3 % peut être retenu (Taylor et al., 2010b). Beaucoup d’études ont montré les avantages de l’utilisation d’un programme de métaphylaxie dans la réduction de la morbidité (jusqu’à 50 %) et de la mortalité (jusqu’à 25%) (Urban-Chmiel et Grooms, 2012). Pour plus d’efficacité dans la lutte contre les BPIE, certains auteurs ont suggéré le recours à la métaphylaxie en même temps qu’un programme de vaccination adapté (Thomson and White, 2006).
APPROCHE PRÉVENTIVE
Maîtrise des facteurs de risque
La prévention fait appel à plusieurs actions qui se complètent pour minimiser le risque d’apparition des BPIE et particulièrement :
• Le transfert correct de l’immunité passive par la prise précoce du colostrum de très bonne qualité et en quantité suffisante;
• La séparation des animaux de classes d’âge différentes : avec l’âge, les animaux peuvent devenir plus résistants à certains germes mais constituent une source de contamination potentielle pour les plus jeunes;
• Pour les lots d’engraissement il faut adopter le concept de «All in/All out» c’est-à-dire le principe de la bande unique avec désinfection entre les bandes;
• L’hygiène générale et le nettoyage quotidien des lieux de stabulation des veaux est primordial;
• Le passage par une quarantaine lors d’achat des animaux est capital;
• Effectuer une transition lors de tout changement alimentaire. Les changements alimentaires rapides constituent un stress qui provoque une baisse de l’immunité;
• L’isolement et le traitement des animaux malades et le renforcement de la biosécurité;
• Une alimentation équilibrée et une vermifugation adaptée;
• Le bâtiment doit être adapté à l’élevage des veaux, confortable, bien aéré et sans courants d’air.
La vaccination et le «preconditioning program»
Les vaccins, mono- et multivalents, contre les agents pathogènes viraux IBR, BVD, PI-3, et le BRSV, et pathogènes bactériens Mannheimia haemolytica, Pasteurella multocida et Histophilus somni sont disponibles au Maroc. En matière de vaccins contre les mycoplasmes, les seuls vaccins actuellement commercialisés le sont aux Etats-unis et leur utilisation est soumise à des restrictions. Beaucoup reste à faire sur ce plan et un bon vaccin contre les mycoplasmes doit tenir compte de leurs forte variabilité antigénique.
Les résultats obtenus lors d’essais cliniques contrôlés sont assez divers quel que soit le vaccin considéré, et vont d’une absence d’effet à un effet protecteur (Martin, 1983; Perino et Hunsaker, 1997). Souvent, pour une telle évaluation, seuls les signes cliniques respiratoires sont retenus comme critères primaires d’efficacité. Les critères zootechniques (GMQ notamment) ne sont retenus que secondairement lieu tandis que les critères économiques sont exceptionnellement pris en compte (Schelcher et Valarcher, 1999).
L’immunité prend 1 à 3 semaines pour se développer, et peut nécessiter plusieurs doses de vaccin avant d’induire une immunité protectrice (Urban-Chmiel et Grooms, 2012). La vaccination des jeunes veaux pose le problème de l’immaturité immunitaire et l’interférence avec l’immunité passive d’origine colostrale, ce qui perturbe l’installation d’une immunité induite par les vaccins administrés (Schelcher and Valarcher, 1999). L’idéal serait de vacciner les veaux avant leur entrée en ateliers de production de génisses ou aux ateliers d’engraissement. Plusieurs vaccins, avec différentes combinaisons de valences, sont disponibles au Maroc. Les seuls vaccins, mono et multivalents, actuellement commercialisés au Maroc sont des injectables inactivés. Ce genre de formulations est basé sur une primovaccination avec deux injections à 4-6 semaines d’intervalle et une immunité acceptable n’est à espérer que deux à trois semaines après l’injection de rappel de primovacciation. Pour ce qui est de l’IBR, le code IBR de l’ONSSA au Maroc prévoit un rappel à 6 mois avec le même vaccin. Par la suite, les programmes de vaccination sont à adapter selon les périodes de risques importantes au sein de l’élevage.
L’une des stratégies adoptées aux États-Unis, connue sous le terme de «preconditionning program» ou programme préventif avant l’allotement pour les bovins soumis à l’engraissement, consiste en un certain nombre d’actions à mettre en œuvre avant le transport vers le site d’engraissement. Il s’agit de vacciner les veaux, en général 35 à 40 jours après sevrage, contre les nombreux pathogènes qui causent les BPIE, de les déparasiter, de les écorner, de les habituer aux mangeoires et abreuvoirs du lieu final de l’engraissement et de les castrer. Idéalement les vaccinations doivent être terminées deux semaines avant le transport pour une meilleure immunisation.
CONCLUSION
Les conséquences économiques des bronchopneumonies peuvent être extrêmement élevées. La diversité des facteurs intrinsèques et extrinsèques en cause dans la genèse de ces affections fait que le traitement curatif à lui seul est insuffisant dans tout programme de lutte. La maitrise des facteurs de risques, de bonnes pratiques d’hygiène, la biosécurité et les programmes vaccinaux adaptés sont quelques éléments importants à considérer pour espérer juguler, autant que faire se peut, ce syndrome complexe.
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