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dimanche, décembre 22, 2024

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Système agroforestier à cacaoyers en Côte d’Ivoire

DESCRIPTION DE QUELQUES PARAMÈTRES ENVIRONNEMENTAUX DANS LES ZONES DE PRODUCTION

La Côte d’Ivoire comprend deux grandes zones agro-écologiques: la zone forestière du Sud et la zone de savanicole du Nord. La culture de cacao est spécialisée dans la zone forestière du Sud. Dans cette zone, le phénomène du déplacement des fronts pionniers encore appelé « boucle du cacao » en matière de production cacaoyère (zone de plus de 150.000 t.an-1), est remarquable du Sud-est au Sud-ouest en passant par le Centre (Figure 1).
C’est en 1888 que la culture du cacao a été introduite pour la première fois par les Français Arthur Verdier et Amédée De Brétignières à Aboisso au Sud-est ivoirien avant de s’étendre aux autres régions (Tano, 2012). Cette zone fut la première boucle du cacao, après une véritable expansion de la production, entre 1910 et 1950 (Schroth et al., 2004). Jusqu’en 1960, le Sud-est ivoirien représentait encore, la seule zone de grande production cacaoyère.
De par le principe de la délocalisation (baisse de production, saturation foncière et manque de terre forestière, etc.), la région du Centre-ouest a pris le relais de la production entre 1960 et 1970 (Ruf, 1991 ; 1995 ; CEPRASS, 2002) pour devenir une nouvelle boucle de cacao à la fin de la décennie 1980. C’est à partir des années 1990 que la région du Sud-ouest a amorcé son cycle du cacao à travers d’importantes vagues migratoires en provenance des anciennes zones cacaoyères (Tano, 2012). Cette zone devint la nouvelle boucle du cacao à la fin des années à partir de la décennie 2000. Les estimations de Koné (2015) des zones de l’Ouest et du Centre-ouest (40 à 100 t.an-1) laissent croire que le front pionnier pourra probablement migrer vers ces deux zones, après l’extrême Sud-ouest de la Côte d’Ivoire.
Le front pionnier du cacao a donc parcouru, toute la grande zone agroécologique du Sud forestier ivoirien. Tous les faciès de végétation du Sud forestier ont aussi été traversés (Figure 1). Le déterminisme de ces principaux faciès est soit géologique, soit pédologique, soit climatique, soit à la fois pédo-climatique (Kouamé et Zoro, 2010). En effet, le faciès de la forêt dense semi-décidue dont fait partie le Centre-ouest, est régi par les faibles précipitations (1000 à 1500 mm de pluie par an), de longues saisons sèches et de déficit hydrique élevé.
Du point de vue du relief la zone fait partie d’un ensemble appelé «chaîne baoulé» qui délimite la région dite de «V Baoulé». Ce relief est peu accidenté avec des altitudes variant entre 130 m et 550 m (Avenard, 1971). Du point de vue de la végétation, la zone du Centre-ouest appartient au secteur mésophile du domaine guinéen. Selon Guillaumet et Adjanohoun (1971), la végétation de cette zone est constituée d’une mosaïque de savanes guinéennes et de forêts denses humides semi-décidues à Celtis spp, à Triplochiton scleroxylon et à Aubrevillea kerstingii.
Les zones du Sud-est et du Sud-ouest appartiennent au type de forêts denses humides sempervirentes qui couvraient tout le Sud de la Côte d’Ivoire (Guillaumet et Adjanohoun, 1971; Monnier, 1983). Ces deux zones sont identifiées comme des centres de gradients de diversités floristiques (Kouamé et al., 2004). Aussi, elles appartiennent à deux faciès différents de forêts denses humides du Sud-est et du Sud-ouest de la Côte d’Ivoire (Kouamé et Zoro, 2010). En effet, la zone du Sud-ouest couvre, dans sa partie littorale, le faciès de forêt dense humide sempervirente correspondant aux forêts psammophiles ou forêts caractérisées par l’association Thurraeantho-Heisterietum de Mangenot (1955). Vers l’extrême Sud-ouest, la zone est caractérisée par des forêts ombrophiles denses humides sempervirentes à Eremospatha macrophylla et Diospyros mannii (Guillaumet, 1967).
La zone du Sud-est quant à elle, appartient au faciès de forêts denses humides sempervirentes pélophiles ou forêts caractérisées par l’association Diospyro-Mapanietum (Mangenot, 1955). Du point de vue climatique, ces zones du Sud-est et du Sud-ouest correspondent aux foyers de fortes précipitations (1500 à 2000 mm de pluie par an) de basses altitudes en Côte d’Ivoire et diffèrent essentiellement. Elles sont également similaires du point de vue pédologique (Figure 1). En effet, les zones du Sud-est et Sud-ouest, sont caractérisées par un relief général de basse altitude. Les sols sont de type ferralitique désaturé (Roose et Godefroy, 1977; N’go et al., 2005; Kouamé et Zoro, 2010).
Les caractéristiques environnementales (végétation, climat et sol) de toutes ces zones forestières, sont donc propices à la production cacaoyère, vu que la boucle du cacao les a toutes parcourues. Comme le soutient Deheuvels (2011), le cacaoyer est par conséquent une plante qui peut s’adapter à une très grande variété de milieux biophysiques, sur des types de sols et de pluviométrie extrêmement variés.
Cependant, l’on peut s’interroger sur les raisons du déplacement du front pionnier en Côte d’Ivoire, des végétations de forêts denses humides sempervirentes du Sud-est aux végétations de forêts denses semi-décidues du Centre-ouest, puis aux forêts denses humides sempervirentes du Sud-ouest.
L’analyse du comportement des producteurs vis-à-vis de la terre permet de comprendre le principe de la délocalisation des zones de production. En effet, pour Angoulvant (1916), au début de l’époque coloniale, les populations du Sud-ouest ivoirien se sont farouchement opposées à la pénétration française. C’est en 1920 que cette zone a été complètement pacifiée. Alors que le Sud-est a entamé son développement dans la première décennie de l’année 1900 par le développement de cette culture d’exportation en plus de celle de palmier à huile. A cette époque, la terre ne constituant pas un facteur limitant du développement des plantations au Sud-est, les producteurs ont eu pour stratégie de réduire les coûts de production en plantant dans de nouvelles forêts aux rendements supérieurs et aux coûts d’exploitation faibles (De Planhol, 1947).
Ce modèle de production à caractère extensif a eu des répercussions sur la disponibilité foncière en accélérant la dégradation du régime climatique (Tano, 2012). Ainsi, le déplacement du front pionnier a répondu à un «modèle presqu’incontournable» (Ruf, 1991, 1995) qui résulte de facteurs sociaux tels que le vieillissement des planteurs et les conflits fonciers, et de facteurs environnementaux et techniques liés au vieillissement des vergers et à l’épuisement de la forêt. C’est d’ailleurs ce que Ruf (1995) explique à travers le «modèle des cycles du cacao». Selon cet auteur, les booms sont toujours suivis de récessions dues aux problèmes agro-écologiques tels que la diminution de la fertilité des sols et la dégradation du régime climatique, la multiplication des plantes adventices et des ravageurs de cultures.

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